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Les professionnels de la répartition pharmaceutique* s'inquiètent des pénuries de médicaments en France et de la situation économique du secteur.

Voici leur tribune : "Le Premier ministre a réuni jeudi 19 septembre les industriels du médicament. La ministre des Solidarités et de la Santé a lancé les travaux ce lundi 23 septembre dans le cadre du "comité de pilotage chargé de la stratégie de prévention et de lutte contre les pénuries de médicaments". L'enjeu est majeur, tant la situation est inquiétante et qu'elle pourrait s'aggraver encore. Agir, c'est d'abord porter un regard lucide sur la réalité du terrain. Selon l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), le nombre de ruptures a été multiplié par vingt depuis dix ans.

Près d'un Français sur quatre s'est déjà vu refuser un médicament pour cause de rupture et une étude de France Assos Santé indique que 14% des Français déclarent avoir vu leurs symptômes augmenter, un sur vingt a dû être hospitalisé. Les projections de l'ANSM pour 2019 ne sont pas rassurantes : les médicaments "d'intérêt thérapeutique majeur" sont largement concernés, c'est-à-dire ceux pour lesquels le pronostic vital du patient est engagé en cas d'interruption de traitement, alors qu'il n'existe pas d'alternative thérapeutique.

Confrontés à ces réalités quotidiennes, nous, répartiteurs pharmaceutiques, sommes ceux qui agissent dans les territoires pour assurer aux patients le meilleur accès aux médicaments et limiter les impacts des tensions d'approvisionnement. Nos obligations de service public nous imposent de livrer les pharmacies de manière égale sur l'ensemble du territoire – de Paris à l'île d'Ouessant – en moins de vingt-quatre heures et de disposer, dans chacun de nos établissements, d'un stock correspondant à 15 jours de consommation habituelle. Au cœur de ce qui est souvent appelé "la chaîne du médicament", entre laboratoires et pharmacies, nous organisons une répartition harmonieuse des médicaments en fonction des besoins. Nous sommes les camionnettes qui livrent quotidiennement 6 millions de boîtes à plus de 21.000 officines françaises.

Forts de cette connaissance du terrain, nous participerons activement aux travaux du gouvernement et formulerons – comme nous l'avons toujours fait – des propositions concrètes visant à améliorer davantage encore la répartition et la gestion des stocks de médicaments pour mieux répondre aux besoins de chaque pharmacie. Encore une fois, nous serons les partenaires des pouvoirs publics, résolument engagés au service de l'accès à la santé pour tous.

La réponse à cet enjeu collectif ne doit pas pour autant occulter la difficulté que vit notre secteur aujourd'hui. Trop souvent considérés comme une variable d'ajustement, nous sommes confrontés depuis plusieurs années à une situation économique alarmante. Nous travaillons à perte! En effet, en raison d'une rémunération réglementée par l'État qui ne correspond plus aux coûts que nous devons supporter et d'une pression fiscale incohérente et excessive, notre profession est aujourd'hui asphyxiée. Si bien que nous ne pourrons bientôt plus remplir convenablement les missions de santé publique qui nous reviennent.

Cette situation n'est pas méconnue des pouvoirs publics. Conscient du danger, le gouvernement s'était engagé à l'Assemblée nationale le 25 octobre 2018 à aboutir à des solutions au cours du premier trimestre 2019. Même s'il y a eu des discussions, à ce jour, cet engagement pris devant la représentation nationale n'est pas tenu.

C'est donc un cri d'alerte que nous lançons aux pouvoirs publics, qui se montrent aujourd'hui mobilisés. Si aucune action n'est engagée, c'est l'affaiblissement durable de nos moyens d'action dont il sera question, avec le risque réel d'aggraver les conséquences pour les patients à chaque nouvelle rupture d'approvisionnement. Concrètement, nous ne serons plus en mesure de garantir l'approvisionnement quotidien des pharmacies. Ni une menace, ni un excès, juste une alerte, car c'est dans l'ADN de notre mission de service public de défendre l'égal accès aux médicaments sur tout le territoire et donc le bon fonctionnement de notre système de santé, auquel les Français sont profondément attachés. Ils ne peuvent être les victimes collatérales d'une situation économique dramatique.

Agir, c'est anticiper. Il n'est pas trop tard pour déminer ce qui constitue, de fait, une bombe à retardement pour la santé des patients en France."

* Les professionnels de la répartition pharmaceutique : Hubert Olivier (OCP Répartition), Olivier Bronchain (Cerp Rouen), Laurent Bendavid (Alliance Healthcare France), Jean Genge (Cerp Rhin-Rhône-Méditerranée), Jean Fabre (Phoenix Pharma), Dominique Lerouvillois (Cerp Bretagne-Atlantique), Philippe Becht (Giphar Groupe).

 

Article prit sur LE JOURNAL DU DIMANCHE

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